Le prêtre Laocoon

 

 

 

Le Laocoon, groupe antique en marbre, palais du Vatican, à Rome

Le Laocoon, groupe antique en marbre, palais du Vatican, à Rome. Cet admirable groupe, regardé comme la production la plus accomplie de l'art, par l'antiquité même, représente le malheureux prêtre d'Apollon (ou de Neptune) au moment où, volant au secours de ses fils enveloppés par deux serpents, il est lui-même étouffé par ces monstres qu'a suscités la colère de Junon. L'artiste est arrivé au sommet de l'art, puisqu'il a excité la pitié, l'amour et l'admiration par la représentation fidèle de la vie, de la beauté, de la douleur et de la vertu... La fermeté du prêtre d'Apollon se fait reconnaître dans le mouvement de la tête, sur le visage, dans le gonflement de la poitrine et jusque dans la contraction des pieds. La douleur n'est, en quelque sorte, que matérielle ; on voit que l'âme a conservé toute sa dignité. Trois sculpteurs rhodiens, peut-être le père et ses deux fils, Agésandre, Polydore et Athénodore, qui vivaient postérieurement au siècle d'Alexandre, probablement sous Auguste ou même sous Titus, s'inspirant des mêmes traditions que Virgile, exécutèrent ce groupe, qui est un des chefs-d'oeuvre de la sculpture antique. Ce fameux groupe, qui ornait, du temps de Pline, une des salles des bains de Titus, fut retrouvé seulement en 1506, sous les ruines du palais de cet empereur, par un certain Felice de Fredi, qui le céda au pape Jules II. (Larousse du XIX°)

 

LAOCOON, fils de Priam et d'Hécube, suivant les uns, frère d'Anchise, suivant les autres. Il était prêtre d'Apollon ou de Neptune. Voyant les Troyens prêts à faire entrer dans Troie le fameux cheval de bois que les Grecs avaient laissé sur le rivage, il s'éleva avec force contre cette résolution, et dépeignit cette machine à ses concitoyens comme un instrument de leur perte prochaine ; mais les Troyens, aveuglés, dédaignèrent le sage conseil de Laocoon, et regardèrent son action comme une impiété. Quelques instants après, survint la catastrophe.

Virgile nous montre le grand prêtre de Neptune s'opposant à l'entrée du cheval de bois qui devait causer la ruine d'Ilion, et lançant dans les flancs de l'animal une javeline qui en fit résonner les profondeurs. Sa mort, dans d'horribles souffrances, fut la punition que lui envoyèrent les dieux favorables aux Grecs. (Larousse du XIX°)

" Laocoon, désigné par le sort pour servir de prêtre à Neptune, immolait un énorme taureau, près de l'hôtel du dieu, paré solennellement. Or, voici que de Ténédos, à travers la mer tranquille, deux serpents... j'en frissonne encore... s'allongent sur la mer, et, déroulant leurs anneaux immenses, se dirigent, d'un mouvement égal, vers le rivage ; leurs poitrines dressées contre les vagues et leurs crêtes sanglantes dominent les ondes; le reste de leur corps, par derrière, se traîne, et leur croupe immense se recourbe en replis tortueux. Un grand bruit se fait dans l'élément salé, qui écume; déjà ils avaient pris terre ; les yeux ardents, pleins de sang et de flammes, ils agitaient, dans leur gueule béante, les dards sifflants de leur langue. Pâles, à cette vue, nous fuyons de tous côtés; eux, d'une marche assurée, se dirigent vers Laocoon et d'abord l'un et l'autre monstre, s'enroulant autour des faibles corps des deux enfants, enlacent leurs victimes, dont ils déchirent les membres misérables. Puis, ils saisissent le père lui-même, qui accourait à leur secours, quelques javelots à la main; ils le lient de spirales énormes, et, après l'avoir entouré deux fois par le milieu du corps, après avoir doublé sur son cou leurs anneaux d'écailles, ils le dépassent encore de toute la tête et de leur encolure élevée. Lui alors, ses bandelettes toutes couvertes de bave et de noir venin, essaye d'écarter avec ses mains les noeuds puissants qui l'étouffent et pousse vers le ciel des cris épouvantables, tels que les mugissements d'un taureau qui fuit, blessé, l'autel, et secoue la hache mal assurée. Mais les deux dragons en un glissement fuient vers les temples, sur la hauteur, gagnant la citadelle de la cruelle Tritonienne, où ils s'abritent aux pieds de la déesse, sous l'orbe de son bouclier. Alors en nos cœurs s'insinue une terreur inconnue, qui nous fait tous trembler; Laocoon a mérité , dit-on, d'expier son crime : son arme a outragé le chêne sacré, il a lancé sur l'échine du cheval son épée criminelle. On crie en chœur qu'il faut transporter la statue à sa place, et implorer la toute puissance de la déesse ! " ( Virgile, Enéide, livre II)